Samedi 1er mai, dès le départ de l’hôtel, nous allons visiter la première basilique paléo-chrétienne de Tunisie. Nous montons ensuite à la kasbah dont nous admirons les remparts et les vastes citernes. Sur les conseils d’un Tunisien qui s’offre à laver notre voiture, nous allons maintenant visiter la mosquée de Sidi Bou Makhlouf. Le gardien nous ouvre alors la porte puis nous conduit jusqu’au faîte du minaret : là vue très intéressante sur les maisons de la ville dont beaucoup sont dotées tout au centre, d’une sorte d’impluvium. Au retour, nous attend «  notre laveur de voiture », un bouquet de son jardin à la main, pour les deux dames. Quelle gentillesse ! La matinée est bien avancée lorsque nous reprenons la route, alors nous nous arrêtons bientôt à un restaurant situé au bord d’un lac de barrage. Au repas, comme cela change! nous avons le choix entre un gros poisson du lac ou des côtelettes d’agneau en brochettes ou rôties, accompagnées de bons légumes frais. Le repas terminé, direction de Téboursouk. Et nous voici bientôt à Dougga La Nouvelle où un panneau indique les ruines à 4 km. Alors traversée d’un bucolique paysage avec, en plein milieu de la route, comme chez nous autrefois, un paisible troupeau de vaches et de moutons. Et soudain c’est l’éblouissement ! Vision inoubliable d’une ville romaine, qui de prime abord ne paraît point morte. Laissant Paul à l’ombre, nous grimpons tous les trois le long d’un large sentier où tout en cheminant nous herborisons. C’est ainsi que nous notons férule, ortie à pilules, grosses euphorbes, bourrache, soucis, Smyrnium olusatrum, Sedum caeruleum. Avec plaisir nous découvrons Citrullus colocynthis qui croît du Sahara jusqu’à l’Inde. Parmi les ruines d’autres plantes prennent le relais. Ce sont : Glebionis (ex Chrysanthemum) coronarium, d’une abondance sans pareille, Lamarckia aurea, Bromus rubens, Convolvulus lineatus, Silene tunetana, Trifolium tomentosum, Echinops spinosum, Paronychia arabica, Minuartia geniculata, Micromeria nervosa, Phagnalon rupestre. Mais comme de coutume, sous la houlette d’un guide qui vient à nous, nous visitons Dougga : le théâtre où se donnent des œuvres classiques de chez nous, le Capitole, le Temple d’Auguste, les thermes liciniens, etc. Quant au mausolée libyco-punique, bien qu’il ne soit pas vraiment à proximité, nous le voyons fort bien d’ici, donc nous n’irons pas. Une fois Paul rejoint, nous continuons par la petite route de l’antique Dougga, laquelle rejoindra la voie principale peu avant Teboursouk. Près de ce croisement, un bel arbuste croûlant sous une profusion de fleurs jaunes, nous oblige déjà à un arrêt : c’est bien un chèvrefeuille, ce que je pensais, en l’occurrence Lonicera etrusca. Plus loin, sur les bas-côtés de la route Teboursouk-Bou Salem, s’épanouissent les Gynandriris sysirynchium. Et au détour d’un virage, un bourricot chargé de deux enfants, nonchalamment s’avance. L’arrêt pour une photo nous permet d’observer deux malvacées, Malva sylvestris et Althaea longiflora. D’un proche champ de blé, émergent des apiacées qui sont Daucus maxima et Magydaris pastinacea vue en Sardaigne. Plus loin, tant à droite qu’à gauche, des étendues de Cachrys. A Bou Salem de nouveau changement de direction pour Bulla Regia où nous arrivons sous une pluie fine et triste. Là encore nous voici accompagnés d’ un vieux guide accomplissant, nous dit-il, 20 km chaque jour. Au pas de charge, d’ailleurs, il nous emmène visiter les luxueuses habitations que les Romains construisirent ici en Numidie, lorsqu’elle devint une de leurs colonies. Pourquoi de telles constructions, jouissant toute la journée de la lumière du jour et préservées jusqu’à nous de l’humidité ? Mystère… Au retour de la visite nous apparaît le Djebel R’bia, aride et hostile, alors que du temps des fastes romains, il était une belle montagne verdoyante et giboyeuse. Enfin, à une bonne cinquantaine de kilomètres, à la nuit tombée, en pleine forêt, se niche l’hôtel des Chênes où nous prenons pension, malgré les chambres mal chauffées.

Basilique paleo-chrétienne du Kef
Le Kef : la Kasbah
Minaret de la mosquée Sidi Bou-Mekhlouf
Lac de barrage de Mellègue
Dougga vue générale
Convolvulus lineatus
Trifolium tomentosum
Paronychia arabica
Minuartia geniculata
Micromeria nervosa
Phagnalon rupestre
Dougga : le théâtre
Dougga : le Capitole
Dougga : le capitole vu de côté
Autres vues de Dougga
De Dougga : vue sur les environs
Dougga : mausolée libyco-punique
Lonicera etrusca
Gynandriris sisyrinchium
Les enfants sur l’âne
Lavatera trimestris
Althaea longiflora
Cachrys ferulacea
Villa souterraine de Bulla-Régia

Dimanche 2 mai et lundi 3, à 9 h nous quittons l’hôtel et avant de démarrer, nous jetons un coup d’œil à la végétation. Dans la forêt de Quercus faginea, point d’endémiques. Voici ce que nous notons : Erica arborea, Urginea (=Charybdis) maritima, Fedia cornucopiae, Asphodelus ramosus, Calycotome villosa, Arum italicum, Allium sub-hirsutum, Crataegus oxyacanthus, Cistus salvifolius, Dryopteris filix-mas. Un peu plus bas, Quercus faginea cède la place au chêne- liège Quercus suber. A Ain Draham nous sommes dans la région où fut abattue en 1932, la dernière panthère de Tunisie. Plus bas encore, à la lisière des bois de chênes, resplendissent de longues traînées de pézizes orangées. A 150 mètres d’altitude, la forêt dense fait place au maquis arboré où aux chênes se mêlent quelques pins pignons. Comme arbustes, on relève Phyllirea angustifolia, Arbutus unedo, Pistacia lentiscus, Erica arborea, Cistus salvifolius. Parmi les herbacées, on relève, abondantes, Scilla maritima, Parentucellia viscosa, Blackstonia perfoliata subsp grandiflora, Centaurium erythraea. A Tabarka, la ville du liège, nous arrivons. C’est un lieu très prisé des Tunisiens qui grâce au climat tempéré peuvent tout aussi bien jouir de la mer que de la montagne toute proche. Nous ne nous arrêtons pas à Tabarka et continuons de rouler sur une route bordée de Bellardia trixago, d’Hedysarum coronarium, de Convolvulus tricolor. Sur les rives de l’oued Beja croissent lauriers-roses et armoises arborescentes. Et un peu plus loin, s’étendent des champs de fougère aigle, rare en Tunisie. Nous longeons maintenant la voie ferrée qui traverse des steppes où par endroits, abonde Cistus monspeliensis. Bientôt arrêt botanique car nous venons d’apercevoir Cryptostemma calendula, astéracée sud-africaine. Un peu plus loin, une autre astéracée de grande taille, Senecio delphinifolius. On note encore Calendula arvensis, Melilotus infesta, et dans les pâtures plus sèches, Galactites mutabilis et Thapsia garganica. A proximité du Lac Serrat où de toutes parts les collines sont plantées d’eucalyptus, nous nous arrêtons pour pique-niquer à l’ombre et par la même occasion, jeter un coup d’œil à la flore. Notons que pour la première fois en Tunisie, nous voyons le myrte, bien qu’il y soit commun. De nouveau en voiture nous voici bien vite en vue de la côte. Personne en ce dimanche sur la plage, sauf, curieusement, sept vaches ruminant, étendues sur le sable. Mais il fait vraiment frisquet en ce 2 mai ! Du coup trois jeunes Tunisiens nous invitent à venir nous réchauffer et à partager les poissons qu’ils font griller. Mais le ciel s’obscurcit, l’orage arrive… il nous faut partir . Soudain au sortir d’une montagne russe, nous avons l’impression d’aller plonger dans les flots. Heureusement le conducteur d’une voiture vient à nous et nous apprend qu’un peu plus loin la route est coupée, qu’il nous faut faire demi-tour. A peine avons-nous retrouvé la bonne route, que le ciel soudain devient noir d’encre : c’est impressionnant, angoissant. Et tout bonnement, la pluie à verse se met à tomber. A Bizerte, nous nous retrouvons, mais pas d’hôtel à notre convenance. De guerre lasse, puisque nous n’en sommes pas très loin, autant retourner à l’hôtel de La Marsa, celui du premier jour, ce que nous faisons illico presto.

Quercus faginea
Fedia cornucopiae
Asphodelus ramosus
Calycotome villosa
Quercus suber
Quercus suber
Pézize orangée
Parentucellia viscosa
Bellardia trixago
Hedysarum coronarium
Convolvulus tricolor
Cistus monspeliensis
Cryptostemma calendula
Senecio delphinifolius
Melilotus infestus
Galactites mutabilis
Thapsia garganica
Myrthus communis
Centaurium maritimum
Evax astericifolia
Cap Serrat : plage aux vaches !

Aujourd’hui lundi nous devons embarquer pour la Sicile où nous retrouverons nos amis Gérard et Françoise Cadel. Alors que faire ? J’avais prévu d’aller visiter les villages berbères de Zriba et de Trakouna et d’y herboriser aux alentours. Mais la circulation difficile aux environs de Tunis peut entraver ce projet, alors nous l’abandonnons. Nous pourrions aussi retourner à Carthage… mais devant le peu d’enthousiasme, nous abandonnons encore et décrétons qu’aujourd’hui sera journée libre. A 17 heures, en route pour La Goulette, le port de Tunis. Après avoir embarqué, dîné légèrement, nous rejoignons nos cabines. Et voilà, le séjour botanique et touristique en Tunisie est bel et bien terminé !

(suite)

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